VERSEMENT DE L'ALLOCATION D'AIDE AU RETOUR À L'EMPLOI À DES AGENTS PUBLICS LICENCIÉS POUR FAUTE
M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli, auteur de la question n° 561, transmise à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Mme Colette Giudicelli. Monsieur le secrétaire d'État, l’allocation d’aide au retour à l’emploi est un dispositif dont la philosophie est vertueuse et louable puisqu’elle assure aux salariés brusquement privés d’emploi un revenu de remplacement leur permettant d’attendre dignement d’en retrouver un.
Le montant journalier brut de l’allocation d’aide au retour à l’emploi se situe autour de 57,4 % du salaire journalier de référence de celui qui se retrouve sans emploi, selon le mode de calcul le plus bénéfique.
Or il se trouve que cette allocation est versée alors même que la perte d’emploi peut résulter d’un licenciement pour motif personnel, y compris pour faute grave ou pour faute lourde, ou encore d’une mise à la retraite d’office, ce qui est une sanction très lourde.
Ainsi, ce dispositif, qui s’applique tant aux salariés du secteur privé qu’aux agents des fonctions publiques peut fort bien entraîner le versement d’indemnités à des agents licenciés par une collectivité locale qu’ils ont lésée financièrement. Ces faits entrainent des sanctions disciplinaires retenues par les conseils de discipline, où siègent les représentants du personnel, et sont même dans certains cas confirmés par les tribunaux administratifs.
Il n’est donc pas question ici de rumeurs ou de visions partiales : il s’agit bien d’actes graves et répétés, reconnus comme tels par les organes disciplinaires et juridictionnels.
Cette mauvaise gestion de l’argent public, souvent très pénalisante lorsque la collectivité est de petite taille, est ainsi aggravée par le versement d’indemnités à ses auteurs. Elle apparaît ainsi particulièrement choquante pour de nombreuses collectivités garantes de la bonne gestion des deniers publics.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'État, connaître votre sentiment sur cette question et savoir s’il vous semble opportun de revoir le système de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, afin qu’il ne puisse pas bénéficier à des personnes ayant été reconnues coupables d’avoir lésé des collectivités publiques.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Madame Giudicelli, la réglementation relative au chômage prévoit que toutes les personnes involontairement privées d’emploi peuvent prétendre aux allocations chômage. En effet, aux termes de l’article L. 5422-1 du code du travail, « ont droit à l’allocation d’assurance chômage les travailleurs involontairement privés d’emploi […], aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure ».
Les cas de perte involontaire d’emploi concernent toutes les formes de perte d’emploi qui ne résultent pas de la volonté manifeste de l’agent.
Le caractère volontaire ou involontaire du chômage est donc, en premier lieu, déterminé en fonction de l’auteur de la rupture du contrat de travail. Si elle incombe à l’employeur, le chômage est toujours considéré comme involontaire, même en cas de licenciement pour faute du salarié. En effet, les allocations pour perte d’emploi constituent un revenu de remplacement et non des indemnités de licenciement ; c’est pourquoi le versement de l’allocation chômage demeure possible. Ce dernier est dû en raison de l’activité antérieure effectuée.
Le versement ou non de l’allocation chômage n’a pas en effet pour objet de sanctionner à nouveau la personne. L’attribution de cette allocation est destinée à lui permettre de percevoir un moyen de subsistance, dans l’hypothèse où elle perd son travail et se trouve dans l’attente d’un nouvel emploi.
S’agissant de la sanction de l’agent, des dispositifs sont prévus à cette fin, notamment le licenciement pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire ou, dans certains cas, la suppression de l’indemnité de licenciement.
En conséquence, tous les cas de licenciement, que ce soit pour insuffisance professionnelle ou pour faute disciplinaire, ouvrent droit au chômage.
S’agissant de la fonction publique, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions du code du travail, notamment de son article L.5424-1, les agents publics ont droit à un revenu de remplacement, qui leur est attribué dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités qu’aux salariés du secteur privé.
Dans ce cadre, les modalités d’application du régime d’assurance chômage sont désormais définies par la convention chômage du 19 février 2009, applicable à compter du 1er avril 2009, qui se substitue à celle du 18 janvier 2001.
Cette nouvelle convention chômage ne modifie pas la réglementation antérieure. Ainsi, aux termes de l’article 2 du règlement général annexé à la convention chômage du 19 février 2009, « sont involontairement privés d’emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte […] d’un licenciement ».
Ces dispositions ont toujours été corroborées par le juge administratif, au plus haut niveau. Le Conseil d’État, dans son arrêt n° 97015, Ville de Marseille, du 25 janvier 1991 a notamment confirmé : « Les motifs disciplinaires ayant entraîné la perte d’emploi ne sont pas de nature à eux seuls à exclure le caractère involontaire de cette perte d’emploi. La révocation présentant un caractère définitif doit être considérée comme incluse dans les hypothèses possibles de perte involontaire d’emploi ouvrant droit au bénéfice de l’allocation chômage. »
Je ne suis pas sûr, madame le sénateur, d’avoir ainsi répondu à votre interrogation. (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli.
Mme Colette Giudicelli. Si, monsieur le secrétaire d’État, vous avez bien répondu à ma question, et je vous en remercie.
Ma question concernait en fait essentiellement la fonction publique, dont le statut paraît parfois un peu trop protecteur, pour ne pas dire irritant. Était en cause le cas d’un fonctionnaire de cadre A, percevant un traitement important : il ne s’agissait pas d’un petit fonctionnaire de catégorie C. Force est de constater que, quelquefois, ce statut fait obstacle à l’équité. C’est pourquoi je m’étais engagée auprès d’un syndicat à soulever cette question. Certes, la plupart des fonctionnaires sont de grande qualité, mais il arrive que la fonction publique soit déshonorée par le comportement de certains.